Billet de la rédaction

« Ne méprisons pas les petits signes car ils peuvent nous mettre sur la trace de choses plus importantes.
Freud », Introduction à la psychanalyse (1923)

Ce Mensuel de janvier 2017 est un point de départ qui en suit d’autres. Celui de Nicolas Bendrihen et son équipe et encore avant, celui de nombreux collègues qui ont écrit et corrigé des textes en rajoutant d’autres points, des points de suspension, des parenthèses, des apostrophes, tant de petits signes …

Car :
Une citation est encadrée par des guillemets, les plus usuels sont les guillemets français (« ») […]
Lorsqu’on cite au deuxième degré – citation dans la citation – on change des guillemets … Les guillemets du deuxième degré sont dits “anglais” (“ ”) ceux du troisième sont des apostrophes (´ ´)

Et encore :
Si on désire ne pas citer intégralement un texte, on marquera la coupe effectuée par un point de suspension encadré par des crochets […] qui sont le signe d’une intervention extérieure, et non pas des parenthèses, qui sont en propre à l’auteur.

Tout lecteur et correcteur rigoureux doit prendre en compte ces règles, pour n’en citer qu’une partie, et procéder à la correction d’orthographe, de ponctuation, de fautes de frappe … C’est le travail d’un comité éditorial, notre travail, où les doutes et les interrogations surviennent quant à l’usage d’une virgule, d’un point de suspension, d’un énoncé en pointillés …

Jacques Drillon, écrivain à l’oreille musicale du Traité de la ponctuation française, a été invité à une soirée « Connexion » et interrogé notamment par Claude Léger dont nous nous souvenons du style. Drillon nous a longuement parlé de la langue et de son rythme, de la ponctuation tel un métronome qui nous dicte le tempo, le point d’arrêt, la reprise, le flottement, le souffle du texte. Les signes de ponctuation sont des raccourcis et la marque d’une ellipse.

La ponctuation indique un rapport particulier au langage et au texte, un rapport intime nous dit Julien Rault dont David Bernard a fait une lecture de son livre Poétique du point de suspension. Essai sur le signe du latent.

Si pour Drillon la ponctuation est la marque d’une ellipse, pour Rault le point de suspension « orchestre un double mouvement, du manque et du dire en plus, du défaut et de l’excès, de la lacune et de l’infinité des possibles ». Les signes de ponctuation, qu’ils marquent le manque ou l’excès, évoquent l’interprétation et la particularité de l’énoncé. Ils font appel au silence, au bruissement, au déchiffrement, à ce qui ne s’entend pas dans le texte et à ce qui se dit en trop. La ponctuation appelle l’indicible.

C’est sans doute pour cette raison que le monde des lettres a été tellement marqué par l’écriture des petits signes. Nous pensons à la ponctuation discrète de Zola, à celle stylistique de Perec, indignée de Queneau ou à celle plus poétique de Céline et Bataille, contrairement à la ponctuation logique et textuelle de Mallarmé. Mais encore, à la ponctuation surmoique de Alain Rey, à la ponctuation organisatrice de discours de Foucault. Les exemples sont nombreux. Et nous psychanalystes pensons évidemment à la ponctuation heureuse de Lacan.

Ponctuation discrète, stylistique, poétique ou logique, ponctuation surmoique ou normative, ponctuation heureuse, l’équipe du Mensuel a pour tâche de suivre les règles pour bien ponctuer un texte. Mais est-ce suffisant pour ponctuer juste ? Derrière ce qui s’écrit, se décline, se rate, s’oublie, se répète, notre ponctuation sera toujours vicieuse et insuffisante comme le disait Paul Valéry.

Anastasia Tzavidopoulou

Sommaire

Pdf du Mensuel (en accès restreint à cause d’un article)

Séminaire EPFCL à Paris
« La parole et son dire »

Séminaire Champ lacanien à Paris
« Croyance, certitude, conviction »

Journées epfcl 2016, « Actes et inhibition »
Activités préparatoires

Journée européenne d’École 2017 à Barcelone
« Le savoir du psychanalyste et son savoir-faire »
Préludes

Bulletin d’abonnement
Anciens numéros

(en accès limité aux membres par décision de l’auteur)