Mensuel 065 Décembre 2011

Billet de la rédaction

Rencontre

Beau signifiant que celui de « rencontre » ! C’est, dans l’intitulé de la Rencontre internationale d’École toute proche, celui d’un pari et d’un souhait. Un pari sur ce qui aura lieu. Un souhait qui peut être impérieux, traduisant un désir, comme le donne à penser l’engagement décidé des responsables de son organisation. Ils travaillent depuis plusieurs mois, soulignons-le, pour que cette Rencontre, entre les nombreux membres de la communauté internationale qu’est notre École, en soit une.

Une rencontre n’est pas un rendez-vous. Le rendez-vous n’assure pas la rencontre. Et il arrive que des rencontres aient lieu sans rendez-vous ! La rencontre annoncée a tout d’un pari. Elle ne sera avérée qu’après coup. Elle sera alors un bon heur – en deux mots, comme Lacan aimait l’écrire.

Riche signifiant que celui de « rencontre », dont on pourrait sans nul doute décliner à plaisir les sens multiples. Lacan s’en est souvent servi. Pas seulement, certes, mais plus d’une fois pour évoquer la rencontre manquée. Ce n’est pas ça ! Inéluctablement. L’objet recherché, jamais trouvé. La jouis- sance attendue, jamais atteinte. L’union rêvée, jamais réalisée. Série dans laquelle peut faire exception, cela vaut d’être rappelé, le partenaire analyste, celui par lequel un sujet réussit enfin à se faire entendre.

S’agissant, ici et maintenant pour nous, d’une rencontre sur ce qui est au cœur de notre tâche d’analystes – l’analyse elle-même, ses fins, ses suites et l’épreuve de la passe qui la vérifie (1) -, il me semble que, parmi toutes les occurrences du terme chez Lacan, il s’en dégage une, privilégiée. Elle date du 21 juin 1964, soit de l’Acte de fondation de l’École freudienne de Paris, et se trouve à la fin de son préambule. Citons in extenso le passage où surgit cette rencontre-là pour ne point la priver de son contexte :

« Il est un point pourtant où le problème du désir ne peut être éludé, c’est quand il s’agit du psychanalyste lui-même.

Et rien n’est plus exemplaire du pur bavardage que ce qui a cours sur ce propos : que c’est là ce qui conditionne la sûreté de son intervention.

Poursuivre dans les alibis la méconnaissance qui s’abrite ici de faux papiers, exige la rencontre du plus valable d’une expérience personnelle avec ceux qui la sommeront de s’avouer, la tenant pour un bien commun. [Souligné par nous.]

Les autorités scientifiques elles-mêmes sont ici l’otage d’un pacte de carence qui fait que ce n’est plus du dehors qu’on pense attendre une exigence de contrôle qui serait à l’ordre du jour partout ailleurs.

C’est l’affaire seulement de ceux qui, psychanalystes ou non, s’intéressent à la psychanalyse en acte.

C’est à eux que s’ouvre l’École pour qu’ils mettent à l’épreuve leur intérêt – ne leur étant pas interdit d’en élaborer la logique. »

Comment ne pas trouver dans ces lignes l’annonce de ce qui allait prendre forme, trois ans plus tard, avec l’invention du dispositif de la passe ? Et comment ne pas reconnaître que ce programme proposé par Lacan à son École… il y a presque un demi-siècle, reste aujourd’hui en vigueur ? Nous ne pouvons que constater son absolue actualité. Elle nous oblige et nous défie.

***

Pour contribuer à sa préparation, le Mensuel de novembre a publié six textes en avant-propos à cette Troisième Rencontre internationale de l’École de psychanalyse des Forums du Champ lacanien. Ce numéro 65, daté de décembre, que ses lecteurs recevront une dizaine de jours avant cette ren- contre, y est entièrement consacré. Se trouvent ici réunis, en version fran- çaise, les « Préludes à la rencontre », d’abord diffusés sur nos listes électro- niques, rédigés par des collègues non seulement du forum français mais de ceux d’Espagne, d’Argentine, du Brésil. À lire, séance tenante ! S. A.

1. Voir à ce sujet l’avant-propos de Jacques Adam, « Passe et garantie », Mensuel, n° 64, novembre 2011.

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Billet de la rédaction : Rencontre

Préludes à la 3e Rencontre internationale d’École

Chronique