Mensuel 016 – Mai 2006

Introduction : Luis Izcovich

L’expérience de la passe se poursuit dans notre École. Tout d’abord discrètement selon l’exigence propre du dispositif : passants, passeurs et cartel de la passe, chacun à son niveau, se rencontrent et participent à une élaboration qui reste à l’ombre, loin des projecteurs. La discrétion est en effet ce qui convient le mieux pour transmettre un témoignage qui porte sur l’intime d’un sujet.

Puis, de temps en temps, dans un contexte précis, quelque chose de l’expérience passe au public, dans notre communauté d’École d’abord, et sort la passe de l’ombre tout en gardant la discrétion. C’est ce qui s’est passé en décembre 2005, à Toulouse. Des journées avaient été organisées pour mieux extraire les conséquences des effets d’École depuis notre mise en place de la procédure de la passe.

Le lecteur du Mensuel pourra ainsi lire l’intégralité des textes produits à cette occasion, ce qui ne va pas sans une dimension de perte : les caractéristiques du Mensuel ne permettent pas de restituer ce qui a participé à la réussite de cet événement, à savoir la richesse des échanges, indispensables pour éviter le risque qui guette toujours la passe, celui de figer la doctrine.

Bien que lucides sur la dimension de mouvement perpétuel qui caractérise une élaboration en cours, nous pouvons néanmoins soutenir qu’un pas a été franchi, à la fois dans la consolidation de notre ensemble, mais surtout dans nos options institutionnelles.

Cette option était pourtant déjà inscrite dès notre départ : « Les Forums auront leur École », dans ce que j’appellerai notre première scansion comme École. En effet, avec ce programme nous prenions un rendez-vous qui nous séparait d’emblée de toute option visant à écarter l’enseignement de Lacan des textes institutionnels qu’il a produits. C’était notre façon de situer au centre de notre politique pour la psychanalyse l’expérience de la passe, et par conséquent de nous distinguer radicalement de toute association analytique, même celles qui se réclament de l’enseignement de Lacan. Cela donc a été notre choix collectif, renouvelé au moment où il a fallu choisir le modèle de notre École, qu’on pourrait désigner comme notre deuxième scansion institutionnelle.

Les textes des journées de Toulouse produisent – me semble- t-il – dans leur logique convergente une autre scansion fondamentale dans notre option. Ils confirment tout d’abord que notre orientation d’École trouve dans la passe son point de levier, permettant d’affirmer que si celle-ci est au centre, ce n’est pas seulement par la garantie qu’elle instaure, mais essentiellement par les effets qu’elle induit jusqu’à la direction de la cure analytique. Qu’on le sache, la passe a une incidence dans le maniement du transfert des analystes.

En effet, bien que la passe reste un choix d’expérience singulier, permettant d’élucider la façon dont le désir de l’analyste advient à un analysant, on peut soutenir que ses conséquences transcendent la question de la nomination. Si ses effets se répercutent jusqu’à la conception que les analystes se font de l’analyse arrivée à son terme, il devient indispensable de veiller à notre politique d’École.

À notre option de départ dans les Forums, il faudrait associer une décision collective, toujours « in progress », qui sans figer notre doctrine assure les conditions de reproduction de l’expérience, à la fois celle d’une analyse mais aussi celle de la passe.

Notre choix, qui n’est pas celui de l’association sans la passe, ni de la passe sans École, trouve son fondement théorique dans les textes de Lacan. Il a certes pu varier dans sa conception de ce qu’on peut espérer du passant, il reste pourtant constant sur la nécessité de nbuer la nomination d’AE à une communauté d’École qui veille aux conditions d’accueil de l’élaboration.

C’est ce qui ressort dans ce recueil d’exposés : de même qu’une analyse devrait être un dispositif anti-infatuation, et la passe là où on constate la marque d’un désir, l’École est ce qui sert aux finalités d’un discours, plutôt qu’aux intérêts de quelques-uns.

Deux options se dégagent. La première consiste à dissocier passe et École. Cela met l’accent sur la nomination et revient à constituer une élite analytique, la communauté des AE celle des détenteurs d’un agalma. Pas besoin d’une École dans ce cas, ou plutôt c’est l’École-fiction. La deuxième, sans négliger la nomination, et mettant l’accent sur la sériation de l’expérience – nomination ou pas – plutôt que de faire de l’AE un titre fétiche, est au service de ce qui peut rendre lisibles les effets de la psychanalyse au-delà du cercle des analystes. Nos lecteurs pourront savoir quel est le choix de notre École à ces journées de Toulouse. C’est ainsi que l’École peut contribuer à l’accueil d’une communauté internationale qui se rendra à Paris, les 1er et 2 juillet prochains, à l’occasion du Rendez-vous.

TROIS ANS D’EXPERIENCE DE LA PASSE DANS L’EPFCL

Témoignages I
– Jean-Frédéric Bouchet : Vers une communauté d’expérience
– Pascale Leray : L’épreuve du passeur
– Anita Izcovich : Finalités

Témoignages II
– Mireille Scemama : Un mot deux passes
– Albert Nguyên : La passe sinon rien

INCIDENCES DES GROUPES ANALYTIQUES SUR LA PSYCHANALYSE

Effets des identifications de groupe
– Sidi Askofaré : Les groupes contre(nt) l’Ecole
– Patrick Valas : Effets des identifications de groupe

Effets de l’École
– Bernard Nominé : Le tour dit plus
– Colette Soler : Politique d’École